De l'adolescence à l'âge adulte

III- L’affirmation sexuée de l’adolescence à l’âge adulte

          A) Les modifications physiologiques de la puberté à l'âge adulte                                          

QU'EST CE QUE LA PUBERTÉ ?

La puberté se passe à l’adolescence, entre l'enfance et l'âge adulte. C’est la dernière étape dans la mise en place du sexe phénotypique de l’adulte. Pendant cette période, on observe un développement des organes et des caractères sexuels. La puberté est très variable d'un individu à l'autre et se manifeste à des moments différents selon le sexe. Le début de cette période est caractérisé par une poussée de croissance et un développement des caractères sexuels secondaires. Ce développement s’effectue sous l’influence d'hormones fabriquées par le cerveau qui stimulent ovaires et testicules. La puberté entraîne des transformations à la fois  morphologiques, psychologiques et comportementales chez la jeune fille ou le jeune garçon. A la fin de la puberté, l’individu a quasiment atteint sa taille adulte et est capable de se reproduire : les organes reproducteurs (testicules pour le garçon et ovaires pour la fille) se développent et deviennent fonctionnels. 


LES HORMONES ET LES TRANSFORMATIONS PUBERTAIRES

A la puberté, la sécrétion de testostérone chez les garçons et d’œstrogènes chez les filles augmente très fortement. Ces hormones sont fabriquées par les organes reproducteurs masculin (testicule) et féminin (ovaire). Les glandes génitales sont-elles mêmes stimulées par les gonadostimulines, qui sont créées par l’hypophyse, une glande située à la base du cerveau.

Chez le garçon, le testicule sécrète de la testostérone durant toute la vie de l’individu. Mais son taux est faible à la naissance et n’augmente qu’à la puberté. Chez la fille, l’ovaire libère cycliquement des œstrogènes de la puberté à la ménopause. Dans les deux cas, les hormones sexuelles sont indispensables au fonctionnement de l’appareil génital et sont à l’origine des modifications physiques occasionnées à la puberté. On peut donc dire que l’œstrogène et la testostérone agissent sur les caractères sexuels primaires et secondaires.



L'ACQUISITION DU SEXE PHÉNOTYPIQUE (CARACTÈRES SEXUELS PRIMAIRES) 

→ Chez le garçon

La testostérone entraîne la production de gamètes mâles (ou spermatozoïdes) en continu dès la puberté et tout le long de la vie de l’individu. Chaque jour, les tubes séminifères fabriquent 200 millions de spermatozoïdes. Ils passent ensuite dans l’épididyme où ils acquièrent leur mobilité, puis traversent les canaux déférents jusqu’à la prostate. C’est dans cet organe que le sperme est formé, il est par la suite évacué par l’urètre lors de l’éjaculation. Ainsi, les testicules doivent à la fois produire des spermatozoïdes et de la testostérone.

L’hormone mâle rend également fonctionnelle les organes qui sécrètent le liquide spermatique : les vésicules séminales et la prostate. Elle permet aussi le développement du pénis et des voies génitales. Le pénis peut entrer en érection et est apte à émettre du sperme vers 13 ans et demi. La première éjaculation consciente apparaît peu après. L’organe génital masculin est donc fonctionnel grâce à la puberté : l’adolescent est apte à procréer. 

→ Chez la fille

L’œstrogène permet la maturation des voies génitales (utérus et vagin) et des organes génitaux externes. Contrairement aux gamètes mâles, les gamètes femelles (ovules) sont produites de manière cyclique jusqu’à la ménopause. Les ovaires de la femme libèrent, périodiquement (selon un cycle de 28 jours) un ovule dans les voies génitales : c’est l’ovulation. Le pavillon de la trompe recueille l’ovule expulsé et le guide jusqu’à l’utérus. Si l’ovule n’est pas fécondé (rencontre un spermatozoïde) durant son déplacement dans la trompe, il meurt et est éliminé.

L’hormone ovarienne entraîne également une augmentation de la masse de l’utérus. Pendant le cycle, la muqueuse utérine s’épaissit pour accueillir l’éventuelle implantation d’une cellule-œuf. La couche interne de la paroi de l’utérus est détruite si l’ovule ne rencontre pas de spermatozoïde : c’est l’origine des règles. L'organe génital femelle est donc fonctionnel grâce à la puberté : l'adolescente est apte à procréer. 


L'appareil génital féminin


LES MODIFICATIONS PHYSIQUES AU COURS DE LA PUBERTÉ (CARACTÈRES SEXUELS SECONDAIRES)

A la puberté, les différences physiques entre les deux sexes s’accentuent. En effet, à cette période, de grands changements physiques, affectifs et sexuels s’opèrent. Ces modifications s’effectuent progressivement sur une période plus ou moins longue selon le sexe. La durée de ces transformations morphologiques peut varier d’un enfant à l’autre, apparaissant entre 8 et 13 ans pour une fille et entre 10 et 14 ans pour un garçon.


Le développement des caractères sexuels secondaires

→ Chez le garçon



La puberté commence par un développement des testicules, causé par l’augmentation du volume des tubes séminifères. Cette modification se poursuit jusqu’à 20 ans. Environ 6 mois après le début de ce développement, le jeune garçon subit une apparition de la pilosité pubienne, une pigmentation du scrotum et un agrandissement du pénis. La pilosité faciale et corporelle apparaît plus tardivement. Vers 15-16 ans, la pilosité du visage se développe puis celle du corps (sur l’intérieur des cuisses, du pubis vers le nombril puis, plus tard, sur le thorax)  jusqu'à 25-35 ans. En plus de ces modifications, le garçon peut aussi voir apparaître une gynécomastie. La testostérone cause une augmentation de l’épaisseur des cordes vocales et entraîne donc une mue de la voix vers 13/14 ans. Le garçon connaît aussi une poussée de croissance vers ses 15 ans et grandit d’environ 9 cm par an, pendant 3 à 6 ans (voire jusqu’à 10-15 ans). La testostérone provoque également une évolution de la composition corporelle, augmentant la masse osseuse et musculaire plus que chez la jeune fille.


La gynécomastie

→ Chez la fille

L'apparition des seins est généralement le premier signe de la puberté. Cette apparition se fait en plusieurs temps. Tout d’abord, les seins s’élèvent légèrement avec l’accroissement du mamelon puis le bourgeon mammaire grossit et l’aréole se pigmente. Enfin, le sein va connaître une seconde poussée jusqu’à sa formation adulte. Après la poussée des seins, la pilosité se développe. Les poils pubiens sont les premiers à apparaître. Ensuite ce sont les poils axillaires qui se développent vers l’âge de 13 ou 14 ans. Le corps de la jeune fille se transforme au cours de la puberté : les cuisses et les hanches grossissent et le bassin s’élargit pour favoriser les accouchements. Elle connait également une légère mue de la voix (celle-ci devient plus grave) et une poussée de croissance, qui lui fait gagner 10 cm par an. Enfin, les pertes blanches annonçant l’arrivée des règles se manifestent. La puberté de l’adolescente arrive ainsi à son apogée. La sécrétion d’hormones (œstrogène) durant cette période cause un changement du caractère et du comportement de la jeune fille.


Le développement des seins

LA MÉNOPAUSE CHEZ LA FEMME

La ménopause marque la fin de la fertilité. Elle dure de la diminution des activités des ovaires jusqu’à la fin des menstruations. Ce n’est en aucun cas un état pathologiqueLes modifications physiques et les manifestations causées par la ménopause varient selon les individus. Dans certains cas, les modifications ne sont pas perceptibles et dans d’autres elles font penser à une maladie.  

La ménopause peut occasionner des bouffées de chaleur, des troubles du caractère et faire apparaître certaines modifications morphologiques. En effet, cet état physiologique peut se traduire par un élargissement de la taille et un changement de la silhouette, une diminution de la taille de la poitrine ou encore l’apparition de rides. De plus, il est possible de voir une apparition d’une pilosité au visage ou une modification du timbre de la voix. Ce sont autant de signes de virilisation qui peuvent apparaître durant la ménopause. Enfin, des troubles vulvo-vaginaux peuvent se faire ressentir. Par exemple, des organes génitaux tels que l’utérus peuvent s’atrophier.


La ménopause chez la femme

L'ANDROPAUSE CHEZ L'HOMME

L'andropause est liée à la baisse de production de testostérone chez l'homme. Cet état physiologique apparaît souvent à partir de 45 ans. Toutefois, le risque d’être touché par l'andropause s'accroît avec l'âge.

L’andropause est causée par une baisse du taux de testostérone pouvant entraîner une baisse de la libido ou de la fréquence et de la rigidité des érections. Cet état peut aussi causer des épisodes de sudation (même si il n’y a pas eu de dépenses physiques), une difficulté à récupérer après des efforts, des moments de fatigue plus récurrents ou encore des troubles du sommeil. Un accroissement de la nervosité ou une tendance à la dépression peuvent accompagner ces symptômes. On peut également observer des modifications physiques durant cette période. En effet, l’andropause peut occasionner la diminution de la masse musculaire, un grossissement du ventre, une fragilité osseuse, une diminution de la pilosité ou encore des douleurs aux articulations et aux muscles.

Ici aussi, ces symptômes n’ont aucun rapport avec un état pathologique.


       B) Une construction identitaire forte à l'adolescence : l'affirmation de l'identité de genre et de l'orientation sexuelle 


L’IDENTITÉ DE GENRE

Nous naissons mâle ou femelle (sexe biologique) mais c’est en grandissant que nous devenons des hommes et des femmes. Ces modèles de masculinité et de féminité sont définis par l’histoire et la culture de notre société. Ce processus s’échelonne tout au long de notre vie et dépend de l’interaction continue entre le biologique et le contexte socioculturel. Cette vision de la sexualité est très personnelle et diffère en fonction des individus. En effet, chaque personne est libre de s’identifier au genre qui lui correspond. Ce sentiment profond, de différenciation et d’appartenance à l’un ou l’autre sexe s’élabore vers l’âge de 2 ans (voir II B). L’identité de genre est la source même de l’identité de soi puisqu’elle permet à chacun de nous de se dire garçon ou fille. Ainsi, elle a une importance prédominante dans la santé physique et psychique des individus et peut susciter en eux des états d’angoisse aiguë en cas d’incertitude quant au genre.
Même si les individus construisent dès leur plus jeune âge leur identité sexuée, c’est réellement  à la puberté et à l’âge adulte qu’ils s’affirment en tant qu’homme ou femme. En effet, c’est avec les modifications identitaires liées à l’adolescence et à la puberté qu’une identité sexuelle stable se développe. Cette transformation est en accord ou non avec l’identité acquise et développée durant l’enfance. Dans certains cas, les transformations corporelles de la puberté entraînent un trouble de l’identité sexuelle. L’individu entre alors en conflit avec l’identité sexuelle vécue durant l’enfance, introduisant un malaise et un rejet du corps réel ainsi que des rôles qui lui sont associés. Ces difficultés psychologiques liées à la façon de vivre le corps sexuée sont appelées « dysphorie du genre ». Certains individus, comme les transsexuels, se reconnaissent dans l’autre sexe, d’autres, comme les androgynes ne s’identifient à aucun ou aux deux sexes tant au niveau morphologique qu’au niveau physique.

Le transsexualisme illustre ainsi de manière remarquable la différence entre sexe biologique et identité de genre. En effet, il démontre que les deux notions sont indépendantes, les transsexuels ayant la conviction d’être enfermé dans un corps dont l’anatomie ne correspond pas à leur identité de genre. D’autres sociétés de culture judéo-chrétienne et musulmane ont ménagé une place à un « troisième » sexe qui n’est pas complètement homme ni complètement femme, par exemple les muxe au Mexique. Ainsi en dépit de la tradition bien ancrée dans les institutions aussi modernes soient elles en apparence, la nature n’oblige pas à penser qu’il n’existe que deux genres. Cela montre bien que l’on ne naît pas homme ou femme mais qu’on le devient.  
L'ORIENTATION SEXUELLE
A l’adolescence, en plus de l’identité de genre, les individus affirment leur orientation sexuelle, c’est-à-dire l’orientation de leurs fantasmes, de leurs désirs et de leurs conduites sexuelles. Cette orientation se présente sous plusieurs formes avec pour pôles l’hétérosexualité (attirance pour une personne du sexe opposé) et l’homosexualité (attirance pour une personne du même sexe). Entre les deux, on trouve la bisexualité, c’est-à-dire l’attirance égale envers les hommes et les femmes. Toute personne hétérosexuelle a refoulé une ébauche de solution homosexuelle et inversement, ce qui prouve bien que l’homosexualité et l’hétérosexualité pures n’existent pas. Ainsi, l’orientation sexuelle est un continuum où chacun trouve sa place.
Il n’existe pas une unique théorie expliquant l’homosexualité et la bisexualité puisque chaque cas est différent. On peut cependant, définir des éléments fréquents dans la personnalité homosexuelle et bisexuelle. Dans la plupart des cas, les homosexuels ont une difficulté d’identification au parent du même sexe. En effet, les garçons ont tendance à s’identifier principalement à la mère et à se soumettre au père plutôt qu’à lui vouloir lui ressembler. Les filles, quant à elles, portent une affection incestueuse au père ce qui entraîne une identification paternelle forte et favorise le choix de partenaire homosexuel. Une autorité parentale excessive, une proximité trop grande avec le parent du sexe opposé ou une présence psychologique ou physique faible du parent du même sexe peuvent expliquer, entre autre, ces difficultés. Mais dans certains cas, l’homosexualité survient après des événements traumatisants comme le viol ou l’agression. Ainsi, il est possible que le choix sexuel ne corresponde pas à la nature profonde de l’individu. Pour chaque personne, les identifications au père et à la mère sont de forces et de natures diverses. De plus, l’identification masculine comporte toujours une part de la personnalité de la femme et inversement.


L'homosexualité, un sujet encore tabou

La bisexualité ne peut pas être expliquée par une unique théorie mais on peut étudier la première étape du développement de l’identité sexuelle (préœdipienne) pour tenter de comprendre cette orientation. Cette première étape correspond à une prise de conscience du genre et à un érotisme où tous les objets sexuels sont possibles. Dans certains cas, l’enfant dont le processus de développement est entravé, demeure à cette étape et établit donc, à l’âge adulte, une relation amoureuse à la fois avec les hommes et les femmes.  
Tout comme l’homosexualité, la bisexualité peut être une période transitoire, liée à la puberté. En effet, le choix du partenaire sexuel n’est pas définitif à l’adolescence. Certains d’entre eux ont du mal à exprimer une orientation sexuelle claire et ressentent le besoin de vivre une période de bisexualité ou d’homosexualité temporaire pour mieux se connaitre. Cette expérience leur permet de s’orienter définitivement vers l’hétérosexualité ou au contraire de reconnaître la bisexualité ou l’homosexualité comme une orientation sexuelle en soi. Cette reconnaissance s’avère parfois difficile pour les adolescents et peut faire place à des sentiments d’angoisse et de dépression importants.

Indépendamment de notre volonté, notre enfance influence notre orientation sexuelle pour une prédominante homosexuelle, hétérosexuelle ou bisexuelle. L’orientation sexuelle est donc une autre face du genre, irréductible au sexe ou à l’identité. Cependant, il n’existe dans notre société qu’un nombre restreint de groupes d’appartenance qui ne sont pas toujours perçus positivement, ce qui rend l’identification problématique. Ainsi, certains homosexuels et bisexuels intériorisent des schémas de culpabilité, d’oppression et de mépris en raison de la répression familiale et sociale à leur égard. Pour ces raisons, ils ont souvent plus de difficulté à trouver un équilibre dans leur vie adulte. 


     C) Une socialisation différenciée entre hommes et femmes dès l'adolescence


LA REPRÉSENTATION DE SOI, UN FACTEUR QUI DIVERGE SELON LE SEXE
Au cours de l’adolescence et de la vie adulte, les individus s’affirment en tant qu’homme ou femme. Cette représentation de soi diffère entre les deux sexes. L'estime de soi regroupe plusieurs dimensions : la réussite scolaire, la popularité, l'aspect physique, les compétences athlétiques  et la conformité comportementale. Mais ces différents aspects de l'estime de soi ne sont pas distribués de manière homogène. Par exemple, elle peut être élevée dans des domaines tels que l'apparence physique et la popularité mais faible dans des domaines tels que les compétences athlétiques et la réussite scolaire. L'importance accordée à chacun de ces domaines varie également en fonction de l'individu. L'adolescent peut avoir une estime de soi favorable sur le plan scolaire mais juger que ses capacités ne sont pas si désirables que cela dans le milieu où il évolue, son estime de soi ne sera donc pas confortée pour autant.
Des études ont montré que l'estime de soi est généralement plus élevée chez les garçons que chez les filles. En effet, les garçons ont tendance à se surestimer et les filles, au contraire, à être trop sévères et critiques vis-à-vis d’elles-mêmes. L’apparence physique semble occuper une place importante dans cette différence d’appréciation entre les sexes. Avec les changements occasionnés à la puberté, l’image de soi évolue chez les filles comme chez les garçons. Mais ce décalage de maturation prend de l’ampleur avec l’âge. Les garçons gagnent en tonus musculaire durant cette période et se rapprochent donc de « l’idéal » masculin actuel. Au contraire, les filles ont tendance à s’éloigner du stéréotype féminin valorisé dans notre société, comme la minceur par exemple. Ainsi, la pression est davantage ressentie par les filles bien que les garçons puissent se sentir mal dans un corps qui ne tend pas vers le modèle sportif. 


hommes-vs-femmes
Une vision différenciée selon les sexes

Ces modèles stéréotypés de la femme sont définis dans la publicité et les médias. On peut donc considérer la presse comme un véritable dictât culpabilisant. En effet, la plupart des photographies de mannequin sont retouchées (visage et corps amincis, jambes allongées…) et s’apparentent ainsi à des modèles inaccessibles, ce qui peut renforcer le sentiment d’échec. Les magazines féminins mettent souvent en avant des articles minceur et renforcent, donc eux aussi, les stéréotypes liés au genre. Cette vision idéalisée de la femme est déformée et n’est pas représentative de la population. Si les mannequins dans les vitrines étaient des femmes réelles, elles ne pourraient pas avoir d’enfants en raison de leur bassin trop étroit. La poupée Barbie, elle non plus, ne pourrait exister dans de telles proportions. Elle serait obligée de marcher à quatre pattes et ne tiendrait pas debout.
Aujourd’hui, la femme moyenne pèse 66 kilos et la moitié d’entre elles s’habillent en taille 44 et plus, ce qui est bien loin de la taille de mannequin. Il y a 20 ans, les top-modèles pesaient 8% de moins que la femme moyenne. Aujourd’hui, cet écart s’est creusé et s’élève à 23%. De plus, les tailles actuelles ont augmenté par rapport au siècle dernier, ce qui a tendance à dévaloriser l’image de la femme et son estime de soi. Par exemple, Marilyn Monroe s’habillait en taille 42 à son époque, ce qui correspond pour nous aujourd’hui à un 46. Ainsi les jeunes filles intériorisent ces codes de la société et ressentent pour la plupart le besoin de se rapprocher au maximum de cet « idéal » féminin. Cette reconnaissance d’une beauté relative est subjective ne favorise donc pas une estime de soi stable.

Face à ce constat réel d’écart entre filles et garçons dans leur construction identitaire, des associations ont initié des camps d’estime de soi pour les filles. Le secteur privé s’est également emparé de la cause puisque le fond Dove propose aux jeunes filles un site web ludique pour mesurer son estime de soi et dispense de conseils. Autre exemple, la marque Always a lancé une campagne de publicité (#comme une fille) pour lutter contre les stéréotypes et redonner confiance aux jeunes filles. Il est donc important pour les filles comme pour les garçons de se définir une image propre sans tenir compte des normes imposées par la société.  



LA PLACE DES HOMMES ET DES FEMMES DANS LA VIE FAMILIALE

Dès l’adolescence, nous définissons notre place dans la société par le choix de nos études, de notre travail et de notre rôle dans la vie familiale. Ces choix sont influencés par l’éducation reçue durant l’enfance et par les stéréotypes qui régissent notre société actuelle. Les attentes de la société envers les hommes et les femmes ne sont pas identiques. En effet, dans les sociétés traditionnelles, on attribue aux femmes le rôle de mère au foyer alors que l’homme est présenté comme le chef de famille qui travaille pour nourrir sa famille. Bien que les mentalités évoluent, les stéréotypes perdurent et les inégalités entre hommes et femmes continuent d’exister.
Aujourd’hui, les hommes et les femmes consacrent en moyenne le même temps pour le travail domestique et le travail professionnel mais la répartition entre les composants demeure inégale entre les deux sexes. Au niveau des tâches ménagères, l’écart de situation entre les hommes et les femmes s’est réduit depuis vingt-cinq ans. En 2010, les femmes consacraient, en moyenne 4 heures par jour aux tâches domestiques contre un peu plus de 2 heures pour les hommes, soit un écart de 120 minutes (il s’élevait à 180 minutes en 1986).
Mais cette diminution ne s’explique pas par une augmentation du temps accordé par les hommes aux tâches ménagères mais plutôt par une diminution du temps féminin. La généralisation des appareils ménagers et l’externalisation des tâches (femme de ménage, nourrice…) sont à l’origine de ce phénomène. De plus, l’inégalité du partage des tâches domestiques est proportionnelle au nombre d’enfants que compte le ménage.

Répartition et évolution selon les sexes des activités dans une journée en 25 ans

On observe également que l’écart de participation entre les hommes et les femmes croie plus les activités sont pénibles. Ainsi, le repassage qui est considéré comme l’activité la plus déplaisante est réalisée à 66% par des femmes contre 14% par des hommes. De plus, les hommes choisissent les activités les plus gratifiantes comme le bricolage, le jardinage ou encore la cuisine et laissent aux femmes les tâches les plus répétitives comme le ménage et la lessive. Les tâches domestiques restent donc très « sexuées ». 
Depuis les dix dernières années, le temps passé par les pères à s’occuper de leurs enfants a augmenté. Ils consacrent dorénavant 50 minutes de plus par semaine mais les femmes continuent d’assumer 65% des tâches parentales. Les mères réalisent près des trois quarts des soins aux enfants, de leur suivi scolaire et des trajets d’accompagnements, tandis que les activités de jeux et de socialisation sont partagées équitablement entre hommes et femmes.
Ainsi, les normes de genre restent prédominantes dans notre société car hommes et femmes continuent d’effectuer des choix conformes à la tradition. En effet, selon l’INSEE, les filles sont impliquées dès leur plus jeune âge dans les tâches tournées vers l’entretien des membres de la famille. Or, ce sont ces normes qui empêchent les futures marges de progression et qui sont à l’origine de l’automatisation des tâches ménagères et de la progression du taux d’activité des femmes.
Au cours des cinquante dernières années, les structures familiales ont beaucoup évolué tout comme les rôles attribués aux femmes et aux hommes dans la famille. Les modèles traditionnels dans lesquels l’autorité est exercée par le père sont peu à peu délaissés pour un modèle plus contemporain où l’éducation est partagée de manière équitable entre les deux parents.
Autrefois, le père incarnait le droit dans une société très communautaire et l’enfant était invité à reproduire cet exemple. Aujourd’hui même si la domination masculine subsiste dans notre société, le père n’est plus le centre de la famille. Avec la maitrise de la fécondité et les revendications en matière d’égalité professionnelle, les femmes accèdent à un nouveau statut et ne se plus considérées uniquement en fonction de leur rôle de mère ou d’épouse.
L’intérêt de l’enfant est aujourd’hui privilégié dans le cercle familial bien que le rôle tenu par la mère dans l’épanouissement de l’enfant soit toujours prédominant. Les nombreuses recompositions familiales amènent également à donner moins d’importance à la filiation du sang. Ainsi, le père reste « éducateur » mais n’est plus nécessairement le «père biologique ». C’est donc la qualité du lien entre parents et enfants qui est privilégié dans les configurations familiales actuelles.  

DES INEGALITES ENTRE HOMMES ET FEMMES DANS LE MONDE DU TRAVAIL
Le monde du travail illustre bien les normes de genre et les inégalités entre les sexes. Ces disparités s’expliquent par une éducation différenciée entre filles et garçons (voir II C). En effet, les individus sont orientés différemment en fonction de leur sexe. Les filles sont dirigées plus facilement vers le soin des autres alors que les garçons sont orientés vers les mathématiques et la physique. Cette situation est paradoxale puisque les filles réussissent généralement mieux à l’école mais l’orientation selon les filières reste très différenciée. Par exemple, les filles sont encore peu nombreuses dans les écoles d’ingénieur et leur part n’est pas en hausse.
Ainsi, les femmes travaillent majoritairement dans des domaines tels que le secrétariat, la vente, l’entretien, l’administration ou l’assistance maternelle. Bien que les femmes soient moins nombreuses que les hommes à accéder aux plus hauts postes, le nombre de femmes cadres a tout de même augmenté. On estime aujourd’hui qu’elles représentent 35% des cadres contre 29% en 1995. Elles occupent principalement des fonctions dans les ressources humaines (7 cadres sur 10) et dans la comptabilité et la gestion (6 cadres sur 10). Même si elles travaillent régulièrement dans des postes d’encadrement d’équipe, elles sont très peu représentées dans les postes de management et de direction. En effet, seulement 10% des femmes sont dirigeantes d’entreprises et 5% membres du conseil d’administration.


Répartition de l'emploi par sexe et secteur en 2014
Répartition de l'emploi par sexe et par secteur
En plus d’être victimes des emplois précaires, les femmes se retrouvent davantage au chômage que les hommes et y restent plus longtemps. Pourtant, elles sont souvent plus diplômées que leurs homologues masculins à la sortie du système éducatif. Les jeunes femmes sont les plus touchées par le chômage : 23% pointent à l’ANPE contre 21% pour les jeunes hommes. Du point de vue de la rémunération, il existe encore de nombreuses inégalités entre les salaires, les femmes étant payées 37% de moins que les hommes, en France, selon l’INSEE. L’inégalité est d’autant plus flagrante en haut de la hiérarchie : de 6% chez les employés à 30% chez les cadres supérieurs. L’évolution des structures familiales est aussi responsable de l’augmentation des inégalités. Avec l’accroissement du nombre de séparations et donc le développement du nombre de familles monoparentales, de plus en plus de femmes à la charge d’enfants se retrouvent en situation de précarité, voire de pauvreté.   
Ces inégalités s’expliquent en partie par le fait que les femmes puissent tomber enceinte. En effet, la majorité des patrons ne veulent pas prendre le risque de payer des congés maternités. Pourtant, un employeur ne peut pas licencier une femme en raison de sa grossesse, et cette dernière n’est pas dans l’obligation de déclarer qu’elle est enceinte pendant un entretien d’embauche. Les employeurs ont également plus de difficultés à confier des responsabilités à des femmes car ils craignent qu’elles ne soient pas assez disponibles en raison de leur implication plus marquée dans la vie familiale.
En effet, 65% des tâches parentales sont assumées par les mères, ce qui pèse sur leur activité professionnelle. Elles doivent parfois interrompre leur carrière et leurs journées de travail sont généralement plus courtes. Les hommes qui souhaitent prendre des congés subissent, eux aussi,  le poids des stéréotypes. Ainsi, il existe une imbrication permanente entre sphère professionnelle et sphère personnelle qui est à l’origine des inégalités entre hommes et femmes. Il n’y a pas de partage au sein de la famille parce dans l’entreprise, les femmes sont discriminées et au contraire, il n’y a pas de partage au sein de l’entreprise puisqu’il n’y a pas de partage des tâches ménagères au sein de la famille.
Les stéréotypes pèsent également un poids important dans les inégalités entre hommes et femmes. Le pouvoir est considéré comme masculin et une femme au poste de commandement perd sa « féminité ». L’expression « travailler aussi bien qu’un homme » montre bien que le pouvoir est assimilé aux hommes. Certains femmes intériorisent ces contraintes ce qui peut conduire à des phénomènes d’autocensure.